La « taxe noire » : un soutien indispensable ou un fardeau pour les jeunes Sénégalais ?

Dans un contexte où la solidarité familiale est une valeur fondamentale, la « taxe noire » ou « Black Tax » en Afrique du Sud, est devenue un sujet incontournable pour de nombreux jeunes Africains, y compris ceux du Sénégal. Cette pratique, qui consiste à envoyer de l’argent à la famille restée au pays, est perçue à la fois comme un acte de dévouement familial et une charge financière.

Publié le 14 octobre 2024  

Moustapha Ngom, jeune Sénégalais de 24 ans vivant en Italie depuis moins d’un an, vit ce dilemme. Bien qu’il ait quitté Louga avec l’espoir de construire un avenir meilleur en Europe, il reste préoccupé par sa famille restée au Sénégal. Ses parents, qui ont financé une grande partie de son voyage, attendent désormais un soutien financier régulier. « Mes parents se sont sacrifiés pour que je puisse rejoindre l’Europe, et maintenant, je suis dans l’obligation de les soutenir financièrement. Je vois cela comme une forme d’investissement familial », confie-t-il.

Ce sentiment de devoir familial pèse lourdement sur les épaules de nombreux jeunes expatriés, souvent contraintes de renoncer à certains de leurs propres rêves pour subvenir aux besoins de leurs proches. Pour Ousmane Fall, étudiant en master à Grenoble, cette situation est également difficile. Entre ses études et ses deux emplois à temps partiel, il doit trouver un équilibre pour envoyer de l’argent à sa famille à Pikine, dans la banlieue dakaroise. Ce double fardeau affecte non seulement sa progression académique, mais aussi son épanouissement personnel.

Immigré envoyant de l’argent vers l’Afrique

Le poids du soutien financier

La taxe noire a diverses origines, mais elle est généralement renforcée par des habitudes et des attentes familiales. Pour beaucoup de familles africaines, en particulier au Sénégal, le succès d’un membre est souvent perçu comme un succès collectif. Cette dynamique crée une obligation implicite d’aider la famille, mais elle peut aussi constituer un obstacle à l’indépendance économique des jeunes.

« Après avoir acheté les uniformes (scolaires), les vêtements et les provisions, ile me restait 20 dollars », a déclaré une ancienne enseignante zimbabwéenne à la BBC. Cette pratique peut freiner les ambitions personnelles, rendant difficile la construction d’un patrimoine individuel.

Une ambivalence profonde

La discussion autour de la taxe noire révèle une ambivalence profonde. Pour certains, c’est un moyen d’exprimer leur amour et leur soutien à la famille. Pour d’autres, c’est un fardeau qui entrave leur épanouissement personnel et professionnel. Il convient alors de noter que ce sont chaque jout des millions de dollars qui traversent les frontières américaines, européennes, voire asiatiques.

D’après le rapport intitulé « Stratégies d’innovation incisive » de l’UNCDF, dans les transferts de fonds des migrants, publié en octobre 2022, « Au Sénégal, les envois de fonds représentent environ 2,6 milliards USD, soit 10,5 % du PIB du pays ».

Bien que ce mouvement contribue à jusqu’à 40 % des revenus ménagers, elle constitue néanmoins un obstacle pour les envoyeurs.

Aujourd’hui, la taxe noire fait l’objet de beaucoup de controverses, notamment depuis que la célèbre actrice kényane Elsa Majimbo a publiquement remis en cause cette pratique très ancienne.

Cheikh Ndiaye

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