De fait, certains quartiers tels que Reubeuss – célèbre pour son pénitencier – enregistrent une relative recrudescence de filles et femmes arborant ce vêtement de tête. Pour les adeptes de la « sociologie vue de l’avion », Dakar et son quota de Guinéennes voilées ajoute à l’impression d’une tendance peu ou prou en hausse notée « parmi les Sénégalaises ».
Laissons la capitale pour la région du Sine Saloum par exemple, où il est courant de voir des petites Sénégalaises de sept, huit ans voilées. Ce dernier cas de figure découle le plus souvent d’une injonction familiale ainsi que de l’effet boule de neige de « l’entre copines ».
Toutefois, la lecture immédiate assimilant le revival du tissu de tête à un retour du rigorisme religieux et comportemental est on ne peut plus inexact.
Pour la plupart des filles /femmes sénégalaises le portant, le voile relève plus d’un suivisme light et d’un phénomène de mode que d’une application littérale du dogme. Bien que le revêtement dudit voile puisse être initialement motivé par une conviction religieuse donnée, la coquetterie propre aux filles et femmes du pays de la téranga way of life vient twister le tout. Y déversant une pleine calebasse de piment, insérant dans l’équation non pas une mais bien plusieurs inconnues regroupées sous le grand chapiteau : « spécificités Sénégalaises ». Saï saï pour beaucoup d’entre elles.
Pour certaines (grandes) filles/femmes, voile oui mais avec un visage (sur)maquillé comme pour un jour de fête (de carnaval, parfois). Voile, mais porté avec un pantalon ultra moulant, un haut échancré, bras dénudés, etc. Voile sans l’acception de la réserve d’ordinaire rattachée à celui-ci. Pour exemple : une voilée menant mettant une avoinée à son cher et tendre. Voilée féministe. Voile combiné avec la coquinerie, le flirt, la drague initiée par ces mêmes filles/femmes etc. Quelques-unes profitant de bout de tissu et de sa connotation de responsabilité apparente pour euthanasier les suspicions de leurs familles et afférents, s’octroyer plus de libertés, et faire « pire » que celles qui n’en portent pas. Les infidèles voilées – infidèles ici pris dans le sens « je trompe mon mari » – sont loin d’être une vue de l’esprit.
Le voile peut également servir à se racheter une virginité sociale. Il n’est pas rare qu’une fille /femme, avançant toute voile dehors (si on peut dire), et dans des tenues aguicheuses et/ou outrancières, étant de toutes les soirées, assumant amant sur amant, sitôt mariée entre en voile, ou en dessous. Dans l’optique de faire oublier son image de naguère et susciter la respectabilité qui selon elle, son mari et la société l’environnant, sied aux épouses du grand quelqu’un ainsi qu’au statut de maman de la progéniture à venir.
En outre, les coiffures africaines modernes nécessitant un montant certain d’argent et plusieurs heures de patience pour la concernée, le voile sur le chef peut, en ces temps de crise financière, relever du pragmatisme capitaliste pur et dur : en un mouvement, pesetas et tiempo économisés. Quand on sait que « le temps c’est de l’argent », ou presque…
Enfin, en ville, certaines portent des voiles plus « bling-bling, money is the thing » que les cache-poumons strass et paillettes des danseuses du ventre libanaises ; c’est dire si pour quelques unes, les motivations sont non transcendantales.
Par conséquent, le sunu voile [1] semble motivé par plusieurs raisons allant du païen, du neutre, au religieux. L’entre deux étant zone de tous les conforts. Ceux s’échinant à ranger le voile dans le seul registre religio normé ont tort ; du moins en ce qui concerne cette zone de la françafrique, de la chinafrique, de la chic Afrique.
C’est ainsi que le Sunugal est spécial indeed et son mode de fonctionnement, spécial trope [2].
Qu’on se le dise. On vous l’écrit. A part ça ça va.
8 janvier 2016 à 20:17, par Couca
Je pourrais faire des analyses ou des obsevations tout à fait analogues quand je contemple comment en très peu d’années les voiles ont fleuri sur tant de têtes charmantes de mon 93 !
Répondre