Au Sénégal il y existe deux sortes de taxis : les taxis officiels peints en jaune (de rares bleus) et ceux n’ayant aucune couleur définie : les officieux. Ces derniers peuvent être verts, rouges, gris, etc. Ces taxis sans bannière sont les taxis clandos ou tout simplement « clandos ». Comme leurs noms l’indiquent : ils sont clandestins et de fait, roulent sans licence. Hors la loi, ils sont tout de même tolérés par celle-ci. Vous ne vous ferez donc pas arrêter par les forces de l’ordre si vous fendez rues et ruelles dans l’un d’entre eux.
Prendre un taxi oblige à un rituel : la discussion. Que vous ayez fait vœu de silence ou pas, vous serez obligé de l’ouvrir, votre bouche s’entend. Les compteurs de taxis étant pour la plupart ou détraqués ou aux abonnés absents, vous ne pouvez juste grimper dans la voiture et faire signe au chauffeur de rouler à toute berzingue droit devant. Afin de ne pas faire face à une surprise salée à l’arrivée – nous parlons du montant de la course – vous devrez donner votre destination avant même de monter dans ledit taxi.
Estimant la distance à parcourir et l’état de la circulation, le taximan vous proposera un prix, que vous trouverez trop élevé : c’est le rite. Vous dites le vôtre de prix, qu’il trouve trop bas : c’est le rite. La gente joute continue : vous, augmentant de peu votre montant, lui descendant de peu sa douloureuse : encore le rite.
De guerre lasse, vous pouvez lui faire signe de partir, d’un air dédaigneux si possible. De son coté, le taximan peut lui aussi en avoir assez de votre tête et s’éloigner. Pour revenir vers vous afin que vous veniez monter.
Cela voudra dire que le dernier prix proposé est accepté. Ne vous formalisez pas de ce petit jeu. Ne pas non plus vous offusquer des quelques mètres à parcourir avant de poser votre auguste personne dans le carrosse stationnant plus loin. Un peu de sport n’a jamais fait de mal à personne : souriez, marchez, montez. Puis dites bonjour au troupeau de moutons transhumant dans la file de gauche.
Irène Idrisse, illustration : Diogo