Vous revenez à Dakar présenter l’album Gospel Journey au public, que signifie ce titre ?
Gospel Journey c’est un voyage à travers le gospel. Dans le gospel quand on est en transe, on tape des mains, on tape sur la poitrine, on tape des pieds, et c’est ce que j’ai utilisé pour la percussion corporelle. Dans le gospel il y a aussi un aspect de chant, de chœur, où on chante en harmonie ; ça aussi je l’ai utilisé. J’ai mis l’accent sur ces deux volets, parce que ce sont des choses que je retrouve dans mon enfance. Quand j’étais enfant, je faisais de la percussion corporelle en chantant une comptine (tank, lokho, nop, baken, bat, guemine) en tapant sur la poitrine, sur les joues, sur les mains. Et avec la musique de Yandé Codou Sene, on remarque que nous avons aussi nos chœurs à nous, même si c’est de la polyphonique, qui m’intéresse profondément je dois le préciser. Donc c’était un peu pour faire la jonction entre ces musiques là.
Le troisième volet, c’est par rapport au dialogue islamo-chrétien. Le gospel est une musique à connotation chrétienne, donc que ce soit fait par un soufi musulman, c’est une manière de dire aux gens d’arrêter de se prendre la tête car nous habitons tous la terre et la première règle pour vivre dans la paix, c’est l’harmonie, l’entente et l’amour. Voici toutes les raisons pour lesquelles j’ai appelé mon album gospel journey.
Quelle est l’histoire de cet album ?
L’histoire a commencé pour moi alors que j’avais 4 ans et que je désirais aller chanter dans l’émission télé de Serigne Diagne Gonzales pour faire plaisir à ma grand-mère (Mame Mady Diaw) dont j’étais amoureux. Je lui faisais souvent des déclarations d’amour en chantant pour elle, et un jour je lui ai dit que je voulais aller à la télé pour chanter pour elle. Elle m’y a finalement emmené, mais arrivé là-bas, j’étais tellement en panique devant le public que je n’ai pu chanter que frère jacques, dormez-vous…Ensuite je me suis retrouvé à la chorale de l’école et lors d’une journée culturelle, le maitre de chœur a tellement aimé ce que je faisais malgré mon jeune âge, qu’il m’a mis au devant de la scène. Voilà comment je me suis retrouvé à chanter à la tête d’une chorale de 30 personnes. Tout ça m’a donné envie de continuer, d’aller plus loin.
Mais l’élément déclencheur, c’est vraiment la soul musique que j’ai mis dans le hip hop. J’ai été le premier artiste africain à mettre de la soul musique dans le hip hop.
Donc pendant des années j’ai été un artiste soul dans le hip hop. Et quand j’ai voulu faire un album solo, ça a été très simple. J’ai juste pris la soul et je l’ai dépouillé des instruments pour n’utiliser que la voix et les percussions corporelles. J’ai fait le choix des percussions corporelles parce que j’ai toujours revendiqué qu’il y a moyen de faire de la musique bio. J’ai donc enlevé les instruments et je les ai remplacés par l’instrument le plus naturel qui est la voix et le corps.
Avec qui travaillez-vous sur ce projet ?
Celui qui a cru en ce projet, c’est mon producteur Malick Ndiaye de Think Zik qui avait produit Ayo et Imani. C’est donc avec lui que j’ai signé parce que c’est celui qui me connaissait et me comprenait le mieux. Il faut savoir qu’il était déjà là au tout début de Daara j, donc c’est quelqu’un qui connait assez bien mon histoire pour connaitre mes compétences. On s’est donc lancé dans cette aventure folle et au départ on jouait pour 4 ou 5 personnes, avant de commencer à remplir les salles de 200 personnes, puis finalement des stades de 80 000 personnes, machallah. Nous étions deux à croire en ce projet et le troisième qui est venu nous rejoindre à Dakar, c’est Philippe Aglaé, le vocaliste que j’appelle le maestro. Ensemble, nous avons fait de l’alchimie en studio à essayer de trouver des fréquences de voix qui devaient être adaptées à ma musique.
Ensuite, on a fait les voix complémentaires avec Gisela, une chanteuse lyrique, soul et jazz, et qui chante avec Camille. Et puis est venu celui que j’appelle de golden voice, Manu Vince, ainsi que Jean Marc qui fait les basses vocales sur scène. Donc c’est avec ces gens que je continue l’aventure et la création, nous nous entendons super bien, il y a une belle ambiance sur la route, et du coup ça m’inspire pour un deuxième album. Mais pour le moment je me concentre sur le prochain album de Daara j family qui doit sortir cette année inchallah.
N’avez-vous pas craint la réaction de votre public à ce style nouveau ?
Au début j’appréhendais leur réaction parce que beaucoup ne savait pas ce que je faisais. Certains pensaient même que ce que je faisais avec le gospel journey c’était toujours avec Daara j family. Et d’autres lançaient des polémiques comme quoi j’avais quitté le groupe, trahit mon frère, etc. Donc pour éviter toutes ces incompréhensions j’ai prit le temps d’être sûr que maintenant les gens comprennent mieux ce que je fais. Et lorsque j’ai fait une avant première en acoustique à Saint-Louis, j’ai compris que maintenant c’était le moment de faire un concert pour un public plus large chez moi. Parce qu’aujourd’hui mon peuple me comprend et je suis mieux à l’aise.
Après deux ans de tournée internationale, vous venez offrir cet album au Sénégal.
Que réservez-vous au public ce samedi 13 janvier au grand théâtre ?
Je promets de la folie, car moi je ne calcule pas. Une fois sur scène, mes musiciens et moi sommes dans une transe folle que nous transmettons à notre public. Nous allons mettre le feu à la scène du grand théâtre samedi. Et j’ai aussi emmené des ingénieurs de lumière qui sont les meilleurs de France, ils ont d’ailleurs gagné le concours des meilleurs ingénieurs de lumière qui a lieu a Toulouse. Et je tenais à ce qu’ils viennent pour qu’en lumières, on voit toute la beauté de ce qu’est une belle scène. Donc ce ne sera pas que du son et des percussions corporelles. Je réserve un spectacle de sons et lumières de taille.
Cet album, est-ce une façon pour vous de pousser les artistes sénégalais à s’ouvrir à d’autres sonorités, d’autres styles musicaux ?
Sans prétention, j’ai envie d’inculquer, de dire à cette jeunesse et aux autres musiciens que l’on peut devenir ce qu’on veut, que l’on peut réinventer la musique. L’on peut créer de l’influence dans le monde et ne pas attendre toujours d’être influencé. Cet album m’a permis de réaliser mon rêve, de l’incarner. Car j’ai toujours rêvé d’être indépendant, de faire la musique que j’aime, de ne subir aucune oppression de quelque maison de disque que ce soit, d’être dans une liberté totale de chanter et de recréer la musique.
Une partie des bénéfices de ce concert ira aux enfants démunis du village pilote. Quelle place ces enfants tiennent-ils dans votre cœur ?
C’est eux l’avenir de ce pays. Les sacrifices que nous faisons, nous devons les faire pour eux, parce qu’ils le méritent. Ces enfants ont envie de donner au Sénégal ce qu’il mérite, mais pour cela il faut qu’on leur en donne les moyens. Pour moi il est important de donner une chance de réussir à tous les enfants. C’est pourquoi j’ai choisi de donner une bonne partie des recettes à ces enfants là qui porteront le flambeau de ce pays et de l’Afrique. C’est pourquoi je lance un appel à ceux qui veulent contribuer à la réussite de ce pays de venir au concert pour donner de la force aux enfants.
« J’aime fabriquer des chapelets et les offrir »
Lorsque vous ne faites pas de la musique, comment passez-vous votre temps ?
Je suis un passionné d’arts martiaux (shotokan karaté et kung fu) et j’en profite pour saluer maître Beye et maître Doudou qui est mon sifou. Je passe aussi mon temps libre à confectionner des chapelets avec des perles qui viennent d’un peu partout, que je donne ensuite en cadeau. Je suis aussi un fana de moteurs de voitures, c’est une deuxième vie. C’est pourquoi j’aime observer tout ce qui est voiture de sport, voiture de collection.
En ce début d’année 2018, quels sont vos souhaits ?
Je souhaite que des choses comme le massacre dernier de 14 forestiers en Casamance ne se reproduisent plus jamais, car nous n’avons pas besoin de violence. Il faut que les gens sachent que 2018 est l’année de l’amour. Les gens doivent se donner de l’amour à eux même, donner de l’amour aux autres. Et aux politiciens, je leur dirai de se donner aussi de l’amour, car la politique c’est aussi un jeu et le plus important c’est le Sénégal. Quand il s’agit du pays, ils devraient consolider leurs forces au lieu de se battre. Le plus important étant de voir ce pays que l’on appelle émergent, être développé.
Je veux que dans les prochaines décennies que l’on arrête de parler de pays émergent en parlant du Sénégal, et que l’on parle définitivement d’un pays développé. Car avant la richesse de la terre, c’est d’abord la richesse de la tête. Il faut que dans nos têtes nous soyons plus disciplinés, plus instruits. Nous devons connaître d’abord notre pays, avant de penser prendre des bateaux pour la Libye et devenir des esclaves. Nous devons consentir à travailler et pour ça l’Etat doit mettre la main à la pâte pour aider tous ces jeunes qui s’investissent à réussir dans leurs projets.
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